Racontez-nous le concept des Free tours « Happy Strasbourg »… (d’ailleurs aviez-vous vu notre « Happy Strasbourg ? 😉 )
Oui, j’avais vu votre vidéo Happy Strasbourg, c’est d’ailleurs arrivé au moment où je me préparais à « entrer en scène », je voulais acheter le nom de domaine « happystrasbourg.eu », mais il n’était plus disponible à cause de cette vidéo si je me souviens bien, j’ai donc du me rabattre sur la version « happy-strasbourg.eu »… Bref, c’était fin 2013, je me préparais à lancer le concept des Free Tours à Strasbourg, concept bien rodé et bien connu de par le monde, sauf en France, comme souvent, mais ça y est, les Free Tours s’installent doucement dans l’hexagone.
C’est un concept très simple, on donne un lieu et une heure de rendez-vous précis, on y propose une visite guidée à travers la ville, on essai de faire passer un bon moment aux gens en leur racontant notre histoire, notre culture et notre identité de strasbourgeois et d’alsacien, et à la fin, c’est « au chapeau », chacun est libre de donner ce qu’il veut, ce qu’il peut, en fonction de son envie et de ses moyens.
C’est un concept doublement gagnant pour les visiteurs : les gens n’ayant pas les moyens d’investir dans une visite guidée privée peuvent quand-même profiter d’un savoir, apprendre des choses, découvrir une ville et passer un bon moment, tout en s’accordant parfaitement à leur propre budget. Contrairement à ce que certaines personnes et médias ont avancé, nous ne suggérons aucune somme, quelle qu’elle soit. En plus, le guide pour avoir un maximum de pourboire à la fin, va bien sûr se donner au maximum pour offrir une belle prestation à ses visiteurs, et avoir plus de chance de se payer une bonne bière rafraîchissante après tant d’efforts.
Combien de personnes composent votre équipe de guides et quel est leur parcours ? Pour vous, faut-il être (obligatoirement) amoureux de la ville pour faire un bon guide ?
Aujourd’hui nous sommes 5 personnes dans notre petite équipe nous avons grossi au fur et à mesure que la demande augmentait, nous proposons cette année deux visites par jour en anglais, 7j/7. En français, nous en proposons deux les samedis, une le dimanche, et encore une dernière visite « surprise » les mercredis, et pour pouvoir tourner un peu, il vaut mieux être quelques uns, parce que c’est fatigant une visite, croyez-moi !
Nos parcours sont très divers et variés, on a tous fait beaucoup de choses très différentes dans nos vies « d’avant », personnellement, en 2003 je passais mon Bac Pro de mécanicien automobile, rien à voir ! Mais je pense que ce sont mes nombreux voyages qui m’ont donné l’envie de partager, et à force de quitter l’Alsace pour découvrir le monde, même s’il y a plein de belles choses tout autour du globe et que je suis loin d’avoir assouvi mes envies de découverte, j’ai très vite compris que ma place était à Strasbourg, là où j’ai vu le jour et grandi. Ça a peut-être l’air un peu bête, mais je sais où est ma place, et je trouve que c’est une information d’importance dans la vie.
S’il faut aimer sa ville pour faire un bon guide ? Sans hésitation : oui ! Il faut avoir un attachement particulier pour l’endroit que l’on fait visiter, ça doit être une passion, sinon qu’y aurait-il à partager ? Si le guide n’est pas passionné par ce qu’il montre et raconte, il y a peu de chance que son auditoire le suive très longtemps. Pour moi c’est une base indispensable, d’ailleurs, mes visiteurs ne mettent pas longtemps à comprendre que je suis très amoureux de Strasbourg et de l’Alsace, et allez, soyons honnête, complètement chauvin aussi !
Qu’est-ce qui vous différencie des « guides touristiques classiques » ?
Ce qui nous différencie des « guides touristiques classiques », et j’aime l’emploi des guillemets, ce n’est pas forcément grand chose. Principalement, ce « Saint Graal » qu’est la Carte de Guide Conférencier Professionnel, tous les guides de l’Office de Tourisme et de l’AGIRA (Association des Guides Interprètes de la Région Alsace) l’ont obtenue après des études potentiellement très diverses et variées. A noter qu’aujourd’hui il existe une Licence particulière qui mène à l’obtention de ce « bout de carton ». Honnêtement, en dehors de ça, je dirais qu’on est très similaires, et encore, un des membres de notre équipe a passé cette licence et possède donc ce fameux « Saint-Graal ». Sinon, auto-entrepreneurs pour la plupart, on est tous taxés à la même enseigne, j’aime aussi à penser que nous faisons tous notre métier par passion comme on vient de l’évoquer, donc on est un peu pareils. Au final, la « grosse » différence, c’est que nous proposons ce concept de Free Tours, nous faisons de la vulgarisation finalement. On s’adresse à un public forcément très large vu que chaque groupe est constitué des plusieurs petits groupes ou individus de tous horizons. Donc quand on a un tel public, il faut savoir s’adapter au plus grand nombre dans notre discours, tout en personnalisant pour créer un lien avec chacun dans le meilleur des cas. Ce n’est pas toujours facile, mais c’est aussi le côté excitant de ces Free Tours, il n’y a pas deux tournées qui se ressemblent.
Mais bientôt, cette différence ne sera plus, les « guides touristiques classiques » détestent tellement qu’on soit là avec nos Free Tours qu’ils ont décidé de nous imiter… C’est qu’on doit vraiment être très mauvais pour qu’ils nous copient…
Vos visites sont-elles plus axées pour les touristes ou les locaux ?
Nos visites sont principalement axées sur les touristes, souvent on part de proche de zéro pour ce qui est de la culture et l’histoire alsacienne, alors il faut commencer avec les bases, et toute cette histoire entre France et Allemagne. Mais de manière générale les locaux qui viennent nous voir en apprennent aussi beaucoup ! Ça a l’air bête, mais c’est souvent la ville où l’on vit au quotidien que l’on connaît le moins, parce qu’on ne prend pas forcément le temps de lever les yeux, contrairement aux endroits qu’on va visiter en vacances…
Et à côté de ces visites quotidiennes, nous avons aussi d’autres parcours, comme le « Secret Tour », axé sur des petits détails cachés et/ou méconnus des strasbourgeois eux-même, ou notre nouveau rendez-vous du mercredi soir, le « Surprise Tour » : tous les mercredis à 18h30 nous proposerons un parcours ou un thème différent, un peu en fonction de l’humeur du guide. Ça nous permettra d’intéresser un peu plus les strasbourgeois à leur ville et à des choses qu’ils n’iraient peut-être pas chercher autrement, et de notre côté, on va continuer à toujours en apprendre plus, pour toujours pouvoir partager plus sur notre belle ville.
Vos prestations sont-elles payantes ? Faut-il réserver longtemps à l’avance ?
Nos Free Tours, comme vous l’avez compris, ne sont pas payants, les gens donnent ce qu’ils veulent/peuvent, et il arrive que des gens ne donnent rien, et j’aime à penser que ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas aimé la visite, sinon pourquoi seraient-ils restés jusqu’au bout ?
À côté nous proposons aussi des visites privées pour les grands groupes ou les gens qui aimeraient profiter d’une visite avec un guide rien que pour eux, et là par contre, nous affichons nos tarifs directement sur notre site. Vous imaginez bien qu’il faut réserver pour une visite privée, par contre pour les Free Tours, nous ne prenons pas de réservation, nous voulons justement rester ouvert à tous, nous préférons présenter plusieurs guides en même temps s’il y a beaucoup de monde, comme samedi dernier (samedi de Pâques) : toujours pas de réservation, par contre nous avions trois guides présents pour pouvoir répartir tout le monde en plus petits groupes, et gagner en confort pour tout le monde.
Quelles sont vos sources d’informations pour apprendre (ou réapprendre) Strasbourg ?
Mes sources d’information sont très variées, mais assez classiques : les livres, internet, les archives aussi de temps en temps…
Sur l’internet il y a Archi-Wiki, qui est un point de départ très intéressant, les sources sont presque toujours citées, donc facile à retrouver. Aux archives j’avais par exemple fait quelques recherches sur les différents plans de Strasbourg au fil des âges, ça fait toujours quelque chose d’avoir des « bouts de papiers » vieux de plusieurs siècles sous les yeux…
Mais principalement, ce sont les livres, et des livres édités sur Strasbourg et son histoire, ça ne manque vraiment pas ! J’ai par exemple une très belle encyclopédie « Histoire de Strasbourg, des origines à nos jours », en quatre volumes édités par les DNA en 1980, une vraie mine d’or ! J’ai aussi le « Dictionnaire historique des rues de Strasbourg », je pense que c’est mon préféré, encore aujourd’hui je dois l’ouvrir au moins une fois par jour, c’est un peu ma bible à moi…
Après il faut savoir faire la part des choses, car les historiens eux-mêmes sont souvent en désaccord entre eux sur pas mal de sujets, donc c’est difficile de trancher sur certains sujets… Bref, j’aime à dire que je suis guide, je raconte les découvertes de ces historiens qui eux, sont sensés avoir raison. Avec les collègues, on a une question débat qu’on remet toujours sur la table pour s’amuser : « Qui est le premier roi de France ? ». Certains auront une réponse toute faite, à l’école on m’avait appris que c’était Clovis par exemple, mais aujourd’hui, encore une fois, les historiens ne sont pas d’accord sur ce point : Clovis ? Hugues Capet ? François 1er ? alors moi je dis quoi quand on me demande, hein ? Hé bien je donne mon avis en expliquant que la science de l’Histoire n’a pas encore répondu à cette question…
Faites-vous des visites dans d’autres villes d’Alsace ?
On ne fait des visites qu’à Strasbourg pour l’instant, comme je le disais plus tôt, pour l’instant l’équipe grossit doucement pour pouvoir répondre à la demande des Free Tours, et je met un point d’honneur à former nos nouvelles recrues, pour que dès leurs premiers Free Tours ils fassent des bons Free Tours.
Après, pourquoi pas un Happy Colmar, Happy Mulhouse, ou même en dehors de l’Alsace ! Mais là je pense qu’on s’avance beaucoup, on a déjà bien assez à penser à Strasbourg, et je ne suis pas près à quitter ma ville, je crois même que je ne le serai peut-être jamais !
Si vous étiez un quartier de Strasbourg ?
Difficile de choisir pour un guide, de manière générale, on a envie de choisir toute la Grande Île ou la Neustadt, mais Neudorf, Koenigshoffen ou Cronenbourg ont aussi leur charme, et même les villes autour comme Schiltigheim par exemple ! Mais si je dois vraiment en choisir un, je pense que je resterais sur le « Castrum », l’emplacement de l’ancien camp romain, finalement la partie la plus ancienne et donc historique de Strasbourg, et pour moi, encore aujourd’hui la plus pleine de vie, avec la cathédrale, les collèges et lycées, les bars terrasses et restaurants partout ! Il y a des gens et de la vie, il se passe toujours quelque chose, et j’aime ça !
Restaurant préféré de Strasbourg ?
Difficile à dire, il y en a tellement ! J’ai envie de citer une Winstub, pour la tradition locale, mais je crois que mon amour du fromage l’emporte : La Cloche à Fromage. M. Tourette est un tel passionné, c’est un régal de suivre sa visite des fromageries depuis votre assiette.
Bar préféré à Strasbourg ?
Allez, celle-là est plus facile, il y a beaucoup de bars à Strasbourg, de plus en plus originaux d’ailleurs, et ça fait plaisir de trouver une telle diversité, mais mon Quartier Général reste l’Académie de la Bière Cathédrale, je crois que j’y passe beaucoup trop de temps d’ailleurs, mais qu’est-ce que j’y peux ? Même s’il ne correspond pas forcément aux critères d’originalité, je m’y sens bien, il y a des bonnes bières, de la bonne bouffe, des gens sympas, surtout des gens sympas d’ailleurs…
Endroit que vous adorez à Strasbourg mais que vous avez honte de dire… ?
Vous êtes dur là, vraiment ? Bon, allez… Bon gré mal gré, je me suis installé à l’Elsau il y a un peu moins d’un an, j’y suis allé à reculons, et finalement j’ai découvert derrière les barres abandonnées par CUS Habitat, un quartier résidentiel étonnamment agréable au vu de l’image qu’on se fait de l’Elsau. Très sympa, très vert, calme, plutôt plaisant finalement !
Bon, rien n’est parfait, j’y habite depuis peu, mais le quartier est en friche depuis des années, deux épiceries, un kebab, un tabac et une poste, voilà à quoi se résume la vie commerciale du quartier, et je n’éxagère rien… Mais bref, on est pas là pour débattre du sort de l’Elsau, même si ça mériterait d’être fait…
En gros, je n’irais pas jusqu’à dire que j’adore l’Elsau, mais j’ai été plutôt agréablement surpris en le découvrant.
Quelle est la chose que vous changeriez en premier si vous étiez Maire de Strasbourg ?
Bonne question, même s’il y a beaucoup de choses qui vont bien, il y en a toujours à améliorer… On pourrait reparler de l’Elsau, de l’usine d’incinération, du GCO ou autres, mais je pense que j’essaierais de faire quelque chose qui touche plus au quotidien des strasbourgeois. Par exemple, une campagne de sensibilisation au « vivre ensemble sur la voie publique ». C’est fou comme les automobilistes, les cyclistes et les piétons sont incapables de s’entendre ou de faire preuve de courtoisie sur la chaussée, et comme toujours, « c’est la faute de l’autre ». Même si je presque tous mes trajets sont à vélo (sans compter mes visites que je fais bien sûr à pied), depuis l’Elsau la voiture s’avère souvent très utile, donc au final, j’utilise un peu tous les types de transports à Strasbourg, et franchement, sur les trois types d’usagers, pas un pour rattraper l’autre, et au final, je crois que c’est ça qui m’énerve le plus souvent dans mes trajets, donc je pense que je ferais ça si j’étais maire de Strasbourg, une campagne de sensibilisation au « vivre ensemble sur la voie publique ».
Votre actualité ? Où peut-on vous suivre sur le web ? Réseaux sociaux..?
Ça c’est un peu la question qui fâche… On a notre site internet tout neuf car refait de fond en comble fin de l’année dernière, notre page Facebook, et… C’est à peu près tout, et la page Facebook n’est pas très active, par manque de temps et de motivation aussi pour être franc… J’avais aussi des projets d’Instagram, mais les choses sont allées tellement vite depuis fin 2013… Bref, il faut que j’arrête de me trouver des excuses et que je m’y mette une bonne fois pour toutes !
En attendant, on poste toutes nos visites Free tours (au moins celles en français) sur Strasbourg Curieux, et vous pouvez toujours aller lire nos commentaires sur Tripadvisor, c’est aussi un réseau social, non ? Et là-bas, il y a de la lecture, promis !
http://www.happy-strasbourg.eu/
http://www.facebook.com/happystrasbourg/
Pour finir : une question originale à me proposer pour le prochain interviewé ?
« A quel moment avez-vous compris que Strasbourg sera toujours votre cœur, votre foyer, votre chez-vous ? »
(Crédit Photos : Fischer Photographie)